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mardi 30 juillet 2013

"On a l'air fin avec nos portables..."

Cyril et moi on avance quand même vers certains âges. Et puis on a un métier considéré comme respectable. On est plutôt sérieux (quoique parés d'un humour ravageur, mesdames savent et apprécient). Et puis lui c'est le plus beau lecteur que je connaisse (catégorie masculine). Il est livre quand il parle des livres.
Pourtant, à minuit on marche dans les rues désertes de Toulouse. "On a l'air fin avec nos portables...".
A deux heures du matin, sur le balcon, le thé chaud entre mains et gorge dans le silence du monde qui dort. "On a l'air fin avec nos portables..."
A quatre heures du matin, continuant sans fin malgré les fatigues des jours et nuits. "On a l'air fin avec nos portables...ah non c'est le mien qui s'éteint."
Quelques heures après sur le chemin de la boulangerie, dans les rues qui s'animent déjà. "On a l'air fin avec nos portables..."
Il y aura donc eu cette nuit des orées traversées aux pas des mots échangés, contenant douleur, élans, foi, vacillements, proximités. J'entendais des chants dans les embruns de ton regard creusant les lointains.
Et puis il y eut cette matinée d'après, pourtant obscurcie des manques de sommeil. Et cette incroyable aubade joyeuse qui me fit tant rire. Cyril la seule personne au monde que je connaisse capable d'entremêler dans les magasins, puis devant un café, une boulangère bulgare, des croissants au tatator, un disque de Sigur Ros surgi d'une autre planète ("mais pourtant c'est bien Sigur Ros, non ?"), les lettres inventées par St John Perse l'empléiadé vivant, et la création en live et sans filet d'un poème de notre journée mais à la Marie Richeux s'il vous plaît (oh que ça m'a plu). Moi je ne faisais que rire et m'émerveiller, et cela ne s'opposait en rien aux paroles serties de peurs des heures précédentes: c'était complémentaire, fondu dans l'identique métal. Précieux.
Parfois, sans vouloir avoir raison et tort, juste en cherchant pour chercher, j'aimerais croire que cette vie ne ferait rien d'autre que des coq-à-l'âne, et que cela suffirait à justifier et expliquer. 




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