Pages

dimanche 30 décembre 2012

"Tordu tour du monde, tout au long, la question..."

Retour du ptit gars, l'heure est venue de moins inverser les cadrans, et puis ya eu Dacha qui ne revient jamais (et a volé mes clés !!), Seb pour une soirée où la symbolique du chiffre trois nous est apparue comme une révélation (mais il y croit pas), Roxane qui veut tout le temps me voir quand j'y suis pas, Benoît mon frère du bout du monde qui passe à la gare mais tellement tôt que j'ai pas pu me lever (oh que tu me manques toi !),  Pascal qui m'attend pour repeindre ses murs (il m'attend toujours, je me réserve pour le réveillon !), Gérard qui vient puis qui vient plus, Zucco qui se déchaîne avec ses rêves en SMS, et inédit pour moi, j'ai fini la semaine en Corse, et en plus ce serait que le début d'un ptit tour du monde, mais que sur Bordeaux ! Cooool !


Japoooooon je t'aime !! Attention la bombe de ces derniers temps venait (encore !) de là-bas, sous la forme d'un roman plutôt policier, et prénommé Le mauvais de Shuichi Yoshida. Roman haletant, pétri de suspenses et d'interrogations: une jeune fille est tuée auprès d'un pont, et à partir de cette trame policière, le roman va prendre le contre-pieds, laissant justement la police à l'arrière-plan, pour s'occuper des personnages proches de la fille. Et dès lors c'est un puzzle très habile et diablement prenant qui se construit, puisqu'entre ce qu'on sait, croit savoir et ignore, l'auteur va effectuer un dosage ultra-précis pour nous amener vers bon nombre de surprises, et surtout apporter un souffle bien plus humain que polar à son histoire. On découvre donc des personnages de tous âges, de tous rêves, de toutes conditions, emportés (parfois malgré eux) dans un engrenage fatal. Bizarrement, cette intrigue morcelée et cette attention aux gens m'a plus fait penser aux films coréens de la grande époque, mais quoiqu'il en soit, on tient là une perle définitive, qui comme par hasard bien souvent répété ces derniers temps, provient de l'excellente collection Philippe Picquier.


Et tant qu'on y est on remet ça aussitôt avec Park Life, du même auteur, un court roman-dérive autour d'un parc, sur le thème le plus doux des amours potentiels: la rencontre dont on n'arrive pas à cerner la nature exacte, ici avec une femme assez excentrique dans sa tête. Cela donne un roman certes moins ambitieux que Le mauvais, obligatoirement, mais qui possède un charme fou, une petite musique de printemps, et tout cela fait tout simplement du bien. Auteur à suivre, auteur déjà suivi.

C'est pas souvent, j'ai lu un roman espagnol que Cyril ne connaît pas (et croyez-moi, ceci est presque impossible !) ! Encre, de  Fernando Tras de Bes est une sorte de conte délirant métaphorique fort plaisant: en 1900, une femme trompe tous les mardi son mari avec un inconnu (toujours le même), sans comprendre pourquoi. Abattu, le mari, libraire, décide de lire tous ses livres pour trouver la raison de cette injustice. Il croisera alors un mathématicien qui a perdu son fils et a le même objectif mais pas les mêmes méthodes. Et dès lors s'ensuit une quête éperdue et loufoque, mais à la Borges, avec érudition et humour pince-sans-rire, à travers tous les acteurs du monde du livre: imprimeurs, éditeurs, correcteur, etc...une fable étonnante et plaisante, idéale pour les lectures de pleine nuit...




Et en avant pour la Corée, La surproductivité de Kim Sung'ok est un petit ravissement situé (et écrit je crois) dans les années 60: le narrateur, un jeune journaliste, se promène entre son groupe de copains, leurs aventures avec un cochon ou un lapin qui fait du théâtre (si si), son amoureuse, un ange selon lui, fille de sa logeuse, le tout sous un regard plein d'humour, de purs délires, et de grande tendresse. Au final, un petit bijou étrange, qu'on ne sait trop comment regarder tant il s'échappe par toutes les voies possibles: amusant ? Touchant ? Décalé ? Précieux, ça c'est certain.


Détour par la Chine avec encore une rencontre, mais plus trouble que dans Park Life: Amour dans une ville enchantée de Wang Anyi est un peu un lost in translation chinois, sauf que les personnages sont tous deux adultes. Une rencontre de dix jours dans un salon littéraire, juste assez pour vivre tous les vertiges entre la passion, le couple, le passé, le quotidien et le futur. Dix jours où tout bascule, ou dix jours comme une parenthèse ? Faut lire pour savoir !




   

L'ultime déflagration viendra des USA avec l'ébouriffant Vie animale de Justin Torres, un peu plus de cent pages débordant de vitalité, de poésie, de style, clairement, pour finalement une suite d'instantanés (mais qui se secouent dans tous les sens) sur une famille: père, mère, trois garçons. On navigue entre le style fou de LF Céline, les visions baroques de la pauvreté voire la misère à la manière des comédies italiennes années 70, et vision crue et pleine d'amour de l'enfance dure et sans naïveté (j'ai parfois pensé au génial film de Bouli Lanners, Les géants). Le tout sur un mode supersonique, ça va vite, ça cogne, pleure, crie, crache, frappe, enlace sans aucune différenciation, et puis le dernier chapitre résonne comme une conclusion inattendue à ce qui semblait n'être qu'une mosaïque éparse: aïe, en plus, il y a derrière tout ça une autre dimension: et là le livre se tait, mais après avoir éructé, hurlé, chanté, presque transformé une boue possible en or: C'est un premier roman, et c'est pas souvent qu'on en lit de si puissants.



On finira l'année cinéma avec le plus simple et souvent le plus fort: le documentaire de Sébastien Lifshitz, Les invisibles, offre du cinéma efficacité garantie (pour moi): on plante la caméra et on écoute des gens parler de leurs vies, ici de vieux homos. Et bien sûr c'est passionnant, parce que quand les gens racontent leurs vies, car ici c'est bien de cela qu'il est question, être soi-même ou à peu près dans un lieu et un temps donné, avec le boulot, la famille, les amours, les désirs, les bifurcations, les sentiments, toute cela brassé par des paroles justes, drôles ou émouvantes, on ressort de là gonflé à bloc, avec en plus l'étonnement d'écouter des gens si âgés parler si aisément d'une intimité qu'on croit allant s'effaçant avec les années, mais non, il y a là une douce sagesse révélée en filigrane: ne nous inquiétons pas, tout reste...

Eh bien moi j'aime bien la chorale pop de Reims The bewitched hands. Et c'est tout !



Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire